Matthäus Merian l'Ancien, Le siège de Prague par les Suédois, 1648 |
Jacques Callot, le maître de Matthäus Merian, Les grandes misères de la guerre, 13ème gravure : le bûcher (1633). |
Formé aux différentes techniques de gravures en Allemagne auprès de Matthäus Merian, il rencontre en 1633 à Francfort le plus grand mécène et collectionneur de son temps, Thomas Howard d'Arundel, ambassadeur de la cour d'Angleterre auprès de l'Empereur, alors en route pour Prague. Intégré à la suite du comte, il a séjourné ainsi en visiteur dans sa ville natale avant de rejoindre en 1637 l'Angleterre où il allait passer sa vie. Bientôt il sera le graveur en titre de la cour, d'abord pour le roi Charles I puis, après la Première révolution anglaise où il connut divers déboires, pour le roi Charles II. La qualité de son œuvre, sa maîtrise de techniques variées, firent de lui le premier graveur de son temps.
Le frontispice d'un recueil d'eaux-fortes d'après des dessins d'artistes du passé comme Léonard de Vinci |
Qu'est-ce qui me plait le plus dans cette image ? Le loup noir qui dévore le visage ? Le tracé infime de la guimpe sur le menton ? L'association du large col blanc et de la mante noire qui font penser au costume d'une religieuse d'un ordre oublié (mais certainement enclin à la débauche) ? Le brillant de la soie sur la jupe ? Le fond comme une toile grossière pour souligner le luxe de cette femme ? Le manchon de fourrure, le col comme une bête tapie autour du cou de sa maîtresse ? Les mèches claires qui s'échappent de la coiffe comme pour souligner la désinvolture de celle qui nous regarde ? Les yeux de myope qui nous fixent derrière le loup ?
Nul ne sait qui se cache derrière le masque — personne peut-être, car cette gravure s'inscrit dans l'une de ces séries qu'affectionnait Hollar, série de costumes, série de fourrures, série de saisons…
Les fourrures comme un animal endormi, le brocard qui dévoile sa splendeur dans l'ombre d'un manchon, le gant et le mouchoir abandonnés sur une pierre mal taillée le temps que leur maîtresse vit sans eux — ce grand silence des objets quand on se défait d'eux mais qu'ils sont emplis de savoirs, qu'ils sont plein des secrets de celle qui s'en pare d'habitude.
Celles qui se parent — si l'une dévoile son visage, moins jeune, plus sage, ses boucles bien rangées de part et d'autre de son visage, les autres à leur tour, dames anglaises de qualité, dérobent leur face sous le loup noir et agrémentent de fourrures et de dentelles la soie noire de leur robe.
La fourrure, le pelage, le soyeux peuvent encore prendre d'autres formes. C'est un visage sans masque mais qui se dérobe sous la chevelure dont le chignon aussi rond et luisant que le manchon de fourrure que la femme portait cet hiver, noué autour d'un creux obscur. Les cheveux follets qui frisent sur la nuque, les boucles qui cachent les joues, rien ne nous dit plus l'âge ni la qualité de la dame, elle n'est plus que col et perles.
Et ceci de rare, une femme montrée de dos.
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